Lis, vis, aime
3 Janvier 2019
L'histoire se passe à la fin des années 90. Erin Gruwell, professeur d'anglais nouvellement nommée, choisit pour son tout premier poste d'enseigner dans un lycée de Long Island par pur militantisme. Elle marche sur les pas de son père, un ancien militant pour les marches pour les droits civiques des afro-américains du temps de Martin Luther King. On lui confie la charge d'une classe très difficile, où la plupart des élèves viennent parce qu'ils y sont obligés, regroupant des cas considérés comme irrécupérables par certains enseignants qui leur reprochent d'avoir terni "leur" lycée au nom de la politique d'intégration.
Pétrie de conviction, de bonnes intentions et débordant d'optimisme, Erin débarque sans savoir que le fait d'être blanche va grandement lui compliquer la tâche. Ses élèves ne font aucun effort pour l'écouter, chahutent et se battent pendant les cours et ne lui accordent aucune attention. Ils reproduisent dans la salle de classe ce qui se passe dans leurs cités: ils se sont regroupés par communauté ethnique.
Jusqu'à ce jour où l'un d'entre eux dresse un portrait caricatural d'un de ses camarades et la fasse circuler dans la classe. Comme toute caricature, le dessin exagérait un détail physique de l'élève, les lèvres épaisses d'un enfant noir en l'occurrence, ce qui eut l'effet escompté: les autres ont eu un rire moqueur.
Erin a profité de cette occasion pour faire le parallèle avec une caricature stigmatisant les Juifs et qui a alimenté la propagande funeste d'Hitler. Et c'est ainsi qu'elle a enfin pu attirer l'attention de ses élèves et faire de son groupe un endroit où chacun se sente accepté comme il est. Puis petit à petit, elle leur a donné le goût de la lecture, de la culture. Mais surtout, elle leur a fait prendre conscience que, contrairement à l'étiquette que le reste du corps enseignant leur a collée, ils ne sont pas des causes perdues mais bel et bien des héros au quotidien. En prenant exemple sur Anne Frank, elle les a incités à partir à la reconquête d'eux-mêmes en écrivant leur propre histoire...
Mon avis:
Ce film tiré d'une histoire vraie est un véritable coup de cœur, magistralement mené par l'actrice Hilary Swank. Il prend tout son sens quand on se réfère aux émeutes raciales qui ont embrasé la Californie en 1992.
L'histoire a soulevé de nombreuses interrogations en moi et j'en ai discuté avec mon fils:
- Il y a tout d'abord les préjugés: de nombreux professeurs n'ont pas cherché à comprendre pourquoi ces élèves avaient tant de mal à l'école et pourquoi ils étaient agressifs. Ils se sont contentés de constater l'effet (la violence) sans chercher à connaître la conséquence (la souffrance). Dans ce film, certains enfants sont confrontés à des problèmes de violence domestique, d'autres ont subi une expulsion de leur logement, une autre encore a vu leur père se faire arrêter abusivement puis emprisonné alors qu'il était innocent, et j'en passe...
Il est tellement plus confortable de les condamner et de considérer que tout effort pour essayer de les en sortir serait vain.
- Il y a ensuite cette volonté d'intégration affichée par l'Etat, on parle de mixité sociale chez nous. Elle suscite souvent une certaine défiance de la part des parents qui sont dans une démarche d'excellence et de méritocratie pour leurs enfants. Je reconnais avoir moi-même demandé à ce que mon fils intègre la "bonne" classe à son entrée au collège. Car l'intention est louable, mais on voit bien que l'Education nationale ne dispose pas des moyens nécessaires à sa mise en oeuvre. Ce sont les jeunes professeurs stagiaires qui "héritent" des classes les plus difficiles dans les ZEP et dont les professeurs chevronnés ne veulent pas. Les mesures coercitives prennent souvent le pas sur la vraie éducation...
- Il y a enfin cette image de soi qui peut tout changer, cette image déformée que la société nous renvoie et qui nous empêche parfois d'avancer. Dans ce film, ces enfants sentaient qu'ils étaient rejetés, que la société n'attendait rien d'eux, ils avaient une image négative d'eux-mêmes. Erin Gruwell a tout fait pour leur rendre cette confiance en soi mise à mal, patiemment elle leur a rappelé qu'ils avaient le pouvoir de changer le cours de leur vie.
Je suis admirative de ces personnes qui sont convaincues qu'elles peuvent changer le monde et qui font tout pour que cela arrive. Et puis il y a tous ces héros ordinaires qui essaient de survivre à un monde hostile et à une guerre qui n'est pas forcément la leur.
Si vous ne l'avez pas encore vu, je vous recommande chaudement ce film qui redonne foi en l'humanité et au vivre ensemble.
Voir le profil de Rachel sur le portail Overblog
Commenter cet article